Il n’est pas étonnant que la comédie St-Vincent, en salles dès aujourd’hui, ait terminé en troisième position du palmarès People’s Choice Award du Toronto Film Festival. La fusion de quelques éléments-clés pour un film indépendant ralliant à la fois public et critiques fonctionne à merveille ici : de grandes vedettes campant de savoureux contre-emplois, une première réalisation prometteuse, un scénario comique intelligent et un message ne sombrant pas dans un sentimentalisme convenu.
Vincent (Bill Murray), alcoolique cynique sur le chômage, vit en marge de la société. Lorsqu’une mère monoparentale (Melissa McCarthy) et son jeune garçon Oliver (Jaeden Lieberher) débarquent juste à côté de sa maison en complète décrépitude, Vincent devient bien malgré lui le gardien d’Oliver après les heures de classe. Entre les visites à l’hippodrome et dans des bars miteux, les leçons de combat et les rencontres avec Daka alias ‘’la dame de la nuit’’, une prostituée russe enceinte (Naomi Watts), Oliver découvre que la personnalité maussade de Vincent cache en réalité un être attachant plein de bonté.
Sans être complètement hilarant ou délirant, St-Vincent comporte un bon nombre de blagues remplies de finesse qui donnent le sourire tout au long de la projection. Le film parvient à maintenir un rythme de croisière entrainant, même si quelques longueurs parsèment le chemin. Sans aucun doute, l’écriture sensible de Theodore Melfi s’avère la pierre angulaire de l’œuvre. Oui, la trame narrative n’esquive pas tous les pièges et clichés hollywoodiens mais le traitement global demeure divertissant et habile. La morale du film ne verse pas dans le mélodrame. La partie dramatique s’intègre efficacement avec la portion plus cinglante et légère. Le scénario ne cherche pas à provoquer ou appuyer les émotions, il les laisse s’épanouir lentement et authentiquement. En ce sens, les thèmes abordés trouveront probablement écho auprès d’un auditoire diversifié.
Pour son premier film, Theodore Melfi propose des plans ingénieux permettant aux spectateurs de s’immiscer aisément dans l’univers terne de Vincent. L’environnement dans lequel les personnages évoluent est hautement crédible. Grâce à une direction d’acteurs terriblement juste, les destinées des personnages suscitent intérêt et compassion.
Appuyée par une distribution extraordinaire, l’œuvre risque d’être nominée dans quelques prestigieux galas au cours des prochains mois. Bill Murray, que nous n’avions pas vu dans un premier rôle depuis Broken Flowers, offre une performance remarquable. Son Vincent est à la fois bougon, désagréable, touchant et profondément humain. Certaines de ses scènes auraient pu devenir caricaturales, mais l’acteur utilise son expertise pour constamment demeurer dans une vérité de jeu sidérante. La chimie qu’il développe avec Jaeden Lieberher impressionne, tout comme le jeune acteur de 10 ans qui a sans doute un brillant avenir devant lui. Incarnant des rôles secondaires, Melissa McCarthy et Naomi Watts parviennent néanmoins à tirer leur épingle du jeu. Autant ses fans que ses détracteurs seront ravis de voir Melissa McCarthy s’adonner à un registre résolument plus dramatique. Dans le rôle d’une mère désarmée incroyablement aimante, McCarthy démontre qu’elle peut se montrer sobre et vraie. Naomi Watts a définitivement hérité du rôle le plus ingrat et le plus facile à cabotiner. Or, l’actrice de grand talent fait valoir son côté comique. Imitant l’accent russe à la perfection, la belle blonde apporte un vent de fraicheur dans des moments plus lourds.
En résumé, même si elle n’échappe pas à quelques longueurs et à une trame narrative un peu trop prévisible, la première réalisation de Theodore Melfi s’avère irrésistible et extrêmement touchante. Les performances parfaitement nuancées de l’ensemble de la distribution rehaussent l’écriture bien maitrisée du scénario.
Ce film est à l’affiche depuis le 24 octobre 2014.
Crédits Photos : Les Films Seville
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