Vu le très mince nombre de films de genre indépendants non subventionnés à sortir en salles au Québec, il est important de souligner la venue des quelques œuvres qui parviennent à réussir l’exploit. «C’est ainsi, dis-je de ma voix d’annonceur de cirque, que le 16 octobre 2015 sort dans une poignée de cinémas québécois le tout premier film de Leonardo Fuica, un thriller d’épouvante, «P=wp, l’Énergie Sombre». Il est bien sur recommandé d’encourager une production québécoise réussissant à faire son chemin jusqu’aux grandes salles, mais peut-être que celle-ci aurait mérité davantage de travail.

La distribution de «P=wp: l’Énergie Sombre». De gauche à droite: Tommy Lavallée, Émilie Leclerc, Sébastien Huberdeau, Isabelle Blais, Pierre-Luc Brillant.
On suivra donc un couple d’étudiants, Éloïse (Émilie Leclerc) et Étienne (Sébastien Huberdeau), alors qu’ils contactent un groupe de chasseurs de fantômes afin d’élucider le mystère entourant la mort d’un ancien collègue. Ils prétendent vouloir documenter l’enquête menée par les chasseurs dans le cadre d’un travail en classe. C’est ainsi qu’entrent en scène les chercheurs du groupe professionnel APPA, qui acceptent de les aider en échange d’une rigueur et d’un professionnalisme exemplaires.
L’enquête du petit groupe traversera différents lieux hantés au Québec (le cimetière de Maplewood, le domaine Rivière-la-Guerre et l’asile hanté de Ste-Clotilde). Fait intéressant : ces dits endroits habités par des esprits sont des lieux qui présentent réellement une activité paranormale. Ouvrez donc les yeux, vous pourriez voir des phénomènes particuliers qui n’ont pas été prévus lors du tournage!
Et les personnages du film, rencontreront ils quelqu’un, quelque chose? Nul besoin de vous répondre, évidemment. Mais au lieu de vivre des expériences paranormales qui auraient pu réinventer le genre, on se limitera toutefois aux clichés habituels : esprits aux yeux noirs provoquant systématiquement un énorme crescendo musical… Assez qu’on s’en demandera qu’est-ce qui nous a effrayés davantage : L’esprit qu’on vient de voir ou plutôt nos tympans qui viennent d’éclater? Malheureusement, la guérison ne sera pas possible, puisque ces punchs musicaux nous seront servis tout le long du film, à environ 8 minutes d’intervalle. Il aurait peut-être été plus judicieux de varier un peu les façons d’amener la tension dramatique (et d’éliminer les jump scare compromettant la catharsis).
Niveau acting, rien à redire. Il est très rafraîchissant de pouvoir écouter du cinéma québécois sans reconnaître nos dix visages habituels. Ici, les Suzanne Clément et Patrick Huard seront remplacés par d’autre acteurs tout aussi talentueux (Huberdeau a tout de même été du casting de Polytechnique et des Invasions Barbares), mais plus inconnus du public. Le jeu très réaliste des comédiens cadre à la perfection avec le style found footage de la réalisation (on reconnaît pratiquement Blair Witch Project).
Justement, P=wp : l’Énergie sombre est la première expérience de réalisation professionnelle de Fuica. Elle se révèle malheureusement un peu maladroite et ne parvient pas à atteindre son objectif de manière juste. Contrairement à un Blair Witch Project (cité précédemment), où le sentiment de crainte est créé par une tension constante et l’absence quasi-complète d’événements horrifiques au milieu du film (à l’exception près de la dernière minute!), L’Énergie Sombre se perd quelque peu en voulant trop en mettre. L’enchaînement des situations, au niveau scénaristique, semble arriver d’un peu n’importe où, et on perdra l’auditeur après trop de questionnements. Le travail au niveau de la mise en scène et du jeu est bien réussi, la direction de la photographie atteint son objectif, mais quelques détails font un peu décrocher (par exemple, quelques erreurs de montage ou l’utilisation d’une Ghost Cam qui nous place du point de vue des esprits, et ce, presque le quart du film).
Malgré quelques petits grincements de dents au niveau technique et scénaristique, P=wp : l’Énergie Sombre gagne pourtant du terrain pour son aspect documentaire. En effet, l’œuvre de Fuica est basée sur des recherches et consultations faite avec la véritable équipe de l’APPA, enquêteurs du paranormal professionnels. En échange de la publicité faite par le film, l’équipe a accepté de revoir le scénario afin de le rendre le plus réaliste possible. L’enquête menée dans L’Énergie Sombre est donc bien représentative de la véritable traque aux esprits. On sera donc très loin des documentaires ésotériques présentés à Canal D.
Au final, P=wp : l’Énergie Sombre gagne son intérêt par son côté informatif. Les lieux de tournage, véritablement hantés, et les informations fournies par l’équipe de l’APPA amène une intention documentaire fort intéressante dans le genre. Malheureusement, trop de problèmes techniques et scénaristiques font décrocher de l’intrigue, qui au final, est déjà vue et n’est sauvée que par le travail des comédiens.
En attendant d’aller voir le film, puisqu’il n’existe encore que très peu de photos de presse disponibles, nous devons nous contenter de partager le lien du Teaser officiel: