Est-ce qu’un livre vaut deux films? Le débat fut lancé depuis longtemps avec Harry Potter et les Twilight de ce monde. Choix souvent plus mercantiles qu’artistiques, séparer le dernier livre ou film d’une saga en deux parties peut parfois être une bonne idée. Hunger Games : La Révolte – La Dernière Partie est chapitre ultime des histoires de Katniss. Est-ce que la fin justifie les moyens?
Malheureusement, Mockingjay aurait probablement été meilleur en un seul film. Le remplissage, soit de dialogues qui ne servent à rien, soit d’un silence souvent négligeable rendent chacune des deux parties beaucoup moins divertissantes qu’elles l’auraient dû. Bien sûr, la faiblesse des deux scénarios s’en ressent automatiquement. Il est vrai cependant que la fin de la première partie marque un tournant dans l’histoire de Katniss Everdeen. Alors qu’elle n’était que le porte-parole d’un mouvement donc elle n’avait aucun pouvoir, son personnage était aussi le porte-parole du film et du scénario, obéissant simplement comme un vulgaire pantin spectatrice soumise du sort de Panem. Alors qu’on la voyait comme une grande guerrière courageuse, elle ne sert finalement qu’à être protégée et soignée. (J’ai arrêté de compter le nombre de fois où elle se réveille sur un lit d’hôpital!) Un personnage horriblement ennuyant et un peu trop fataliste qui perd ses lettres de noblesse d’héroïne moderne dont les jeunes filles s’inspirent. Bien heureusement, tout ça, c’est du passé et Katniss se dégourdit dans ce quatrième et dernier film pour retrouver enfin sa fougue et sa bravoure qui faisait son charme dans les deux premiers volets.
Panem est en guerre. Alors que le District 13, gouverné par Alma Coin, tente d’unir les forces de tous les Districts pour enfin détrôner le Président Snow et son régime totalitaire, Katniss se repose de ses blessures et doit se mettre enfin à l’évidence de la raison qui la pousse depuis le début à affronter Snow. Ce n’est ni sa sœur, ni Peeta, ni le beau Gale (Team Gale), mais bien pour la survie d’une nation dont elle représente l’espoir d’un monde meilleur. Elle décide alors de partir à la Rambo, équipée de son arc et de sa soif de vengeance pour affronter le Président Snow. Comme elle a dû faire face dans les Hunger Games, elle va devoir se battre ici pour gagner la bataille finale.
Ses amis ont vu que ça n’avait aucun sens et ont décidé de l’accompagner avec une unité militaire (composée bien sûr de Peeta et de Gale) armée jusqu’aux dents et équipée d’un radar pour détecter les pièges mortels que Snow a mis sur leur route. Sans surprise, le scénario de Mockingjay n’est pas la grande force du film. Simple et extrêmement diluée en raison des deux parties, l’histoire finale de Katniss met beaucoup plus d’emphase sur l’action que sur le triangle amoureux ou même sur les enjeux qui ont mené Panem à la révolution. Malgré sa durée de plus de deux heures, ce dernier chapitre peine à répondre à de nombreuses questions restantes et à conclure la plupart de ses personnages secondaires de digne façon et ainsi rentabiliser une distribution plus qu’exemplaire (Julianne Moore, Philip Seymour Hoffman, Donald Sutherland et j’en passe). Les péripéties et la plupart des revirements sont somme toute bien construits et bien enchainés, donnant droit à un bon divertissement et à une fin enivrante, mais du point de vue narratif, on peine à réaliser qu’il s’agit vraiment de la fin. La séquence finale, sans être époustouflante et imprévisible, joue plutôt l’habituelle note de la tendresse et ne manquera pas de réconforter les admirateurs de la série et d’histoire d’amour.
Si Mockingjay ne s’en tire pas trop bien sur papier, il faut dire qu’à l’écran, on passe un bon moment. Techniquement, on a droit à peu de défauts. La réalisation de Francis Lawrence est impeccable et rend merveilleusement bien tout le talent de ceux qui ont créé et construit le monde dystopique de Panem, ses lieux et décors et ses costumes rétrofuturistes. La musique de James Newton Howard scie parfaitement à l’univers et offre une belle tension supplémentaire aux scènes d’action qui ne manquent pas dans ce chapitre final. Si les effets spéciaux des derniers volets n’étaient pas impressionnants, on semble ici avoir corrigé le tir avec des effets beaucoup plus convaincants. La scène dans les égouts est sans aucun doute la plus impressionnante et réussit. L’effet de paranoïa, le danger présent qu’on ne voit pas, mais qu’on entend et le calme insoutenable avant l’affrontement, on pourrait presque croire à une scène d’Alien.
Niveau acteur, on se réjoui de voir une si belle brochette d’acteur accompagnée la talentueuse Jennifer Lawrence, ici plus à l’aise et plus charismatique que jamais dans son rôle, mais on ne peut qu’être déçu de voir Donald Sutherland par exemple dans un rôle qui n’arrive pas à la cheville de son talent. Son personnage ne détient ni l’excentricité ni la profondeur nécessaire pour qu’on adore le détesté malgré toutes les choses ignobles qu’il a pu faire au courant des 4 films. Même cas pour Julianne Moore, qui a un personnage assez important dans l’intrigue de Mockingjay. Pourtant tout son talent ne suffit pas à rendre Alma Coin mémorable ou même intéressante. Si tous les personnages d’Hunger Games semblent si dévouer à Katniss, il faut dire que Suzanne Collins semble s’être dévoué elle-même qu’à Katniss et à son triangle amoureux au niveau de la construction de ses personnages. Parlant du triangle, Josh Hutcherson gagne en talent de film en film. Il n’a plus le regard stoïque et la moue boudeuse habituelle et la justesse de son jeu est bien souvent épatante. Il n’est pas aussi impressionnant que dans Escobar, mais force d’admettre qu’il n’est plus l’acteur minable qu’il était.
On ne peut blâmer ou même excuser le succès d’Hunger Games. Malgré de nombreux défauts quant à la pauvreté du scénario et quelques revirements plus ridicules, le concept se veut excellent; il est facile de le comparer à n’importe quel régime totalitaire, les personnages sont intéressants; même si certains mériteraient qu’on s’y attarde plus, et le mélange action, drame amoureux et même politique de la série offrent un excellent et intelligent divertissement qui dépasse la plupart des séries adaptées au cinéma. On ne peut que dire au revoir en sifflant les trois doigts en l’air à Katniss.
Crédit Photos : Séville
Sortie en salle : le 20 novembre 2015