Après Algo, Polly & Turcot, documentaire révélateur sur la gentrification vue à travers les yeux de deux faucons pèlerins à Montréal, Alexandre Sheldon s’attaque à un autre sujet important: la vie privée. Elle est inexistante à l’ère des réseaux sociaux. Ce documentaire d’actualité brise l’image qu’on a du hacker cagoulé ou dissimulé derrière un masque de V for Vendetta. C’est en se centrant sur la ville de Montréal et l’endroit qu’elle occupe dans la lutte globale pour la vie privée que le récit narratif se trace. Ce documentaire est raconté avec des styles visuels tape-à l’œil qui accrochent dès le début.
À Montréal habite un des co-fondateurs du système de navigation Tor. Ce navigateur, en est un qui permet d’avoir un anonymat en surfant sur internet. En découvrant que l’internet est un terrain ou n’importe qui peut accéder à l’information de n’importe qui, n’importe quand avec les bons outils, il est primordial de se protéger si l’on veut avoir une vie privée. En exposant ce concept, Sheldon pousse plus loin avec des exemples concrets de comment nos vies sont dépourvues d’intimité. Nos trajets en Uber sont enregistrés et comme beaucoup d’autres informations personnelles, ils sont ensuite disponibles à la compagnie la plus offrante. Oui, nos identités et tout ce qu’on peut trouver publiquement sur nous est monétisé. C’est-à-dire que sur les réseaux tels que Facebook, Twitter, Google, etc, nous ne sommes pas les clients, mais le produit.
Ce documentaire fait acte de résistance avec l’information qu’il rend disponible et compréhensible.
Le traitement visuel se démarque des documentaires reportages dès les premières scènes. En effet, le réalisateur a filmé un engin fictif que l’on croirait être un ordinateur d’une puissance insolite à la 2001: Odyssée de l’espace. Cette vision inhabituelle et artificielle revient plusieurs fois, constituant un bon élément de narration et de transitions entre les scènes. Ce style se mêle à l’entrevue et à une caméra un peu plus intrusive qui suit des personnages. Cette variété de matériel visuel signé par de multiples directeurs de la photographie est bien mis en récit par le monteur Alexandre Lachance. C’est grâce au dynamisme de son montage que ce film empli de complexité est accessible au public. Dès le début le style est assourdissant parce que images bizarres, musique et narration sont présentées presque toutes en même temps. L’oeuvre aurait beaucoup gagné si les éléments étaient présentés graduellement et non d’un seul coup. Heureusement, ce n’est pas trop et l’information est captivante, donc on s’habitue rapidement.
Toutes ces pièces narratives sont enveloppées avec une musique remarquable signée Uberko. Sa composition amène réellement le film à un niveau supérieur de qualité cinématographique.
Cette oeuvre sur un des enjeux les plus importants de l’ère de la communication est vraiment à ne pas manquer.
À l’affiche au Cinéma Cartier à Québec et au Cinéma du Parc à Montréal
En 2019 la vie privée n'existe plus. Y a t'il même de l'espoir à se réapproprier notre identité?