C’est dix ans après le succès du tout premier Funny Games (1997) que le réalisateur Michael Haneke, que l’on connaît entres autres pour ses succès Amour et Le ruban blanc, a réalisé le remake du thriller. Une reprise pratiquement identique au film original : mêmes plans de caméra, mêmes répliques, même ambiance troublante. Si la deuxième version de Funny Games laisse perplexe certains cinéphiles, il n’en est pas moins un chef d’œuvre, une réflexion efficace sur la violence et la cruauté.
Haneke réalise donc ici une œuvre troublante dans sa simplicité : Une petite famille (Naomi Watts, Tim Roth et le jeune Devon Gearhart) s’installent dans un chalet sur le bord d’un lac afin de passer un peu de bon temps. Mais il ne faut croire que la chance n’est pas de leur côté, car la journée-même de leur arrivée, deux voisins mystérieux, après avoir fait connaissance avec la petite famille, les kidnappent et les séquestrent dans leur propre maison. Leur but : les tuer avant les petites heures du matin en jouant à un ou deux Funny Games.
Rassurez-vous ici, les jeux que les trois victimes seront forcées de compléter sont loin d’être Funny. Que ce soit une petite chasse au trésor pour trouver le cadavre d’un d’entre eux ou un striptease dont l’enjeu est l’arme utilisée pour la prochaine torture, on ne doute pas de l’imagination sadique et barbare des deux kidnappeurs. On se demande même très sérieusement si la famille réussira à passer la nuit.
Funny Games, malgré son allure de film provocateur et sanglant, n’est pas du tout dans la même lignée qu’un Saw ou Hostel. Ici, pas question de montrer des gros plans inutiles de jambe sciée en deux, de tripes et d’hémoglobine. L’entièreté de la réalisation se trouve dans la suggestion et l’anticipation. On ne voit pas les tortures infligées à la famille, mais on les comprend, on les vit.
Michael Haneke, dans sa réalisation, s’interroge sur l’intérêt étrange qu’a la population de voir de la cruauté au cinéma. En effet, si Funny Games ne contient pas énormément de violence graphique, les propos et le ton utilisés sont crus et barbares par eux-mêmes. La critique de la violence au cinéma va même jusqu’à certaines scènes où les ravisseurs franchissent le quatrième mur en adressant quelques regards complices à la caméra. C’est à ce moment qu’on comprend le point essentiel de Funny Games : Les kidnappeurs ne font pas que contrôler la famille prise en otage, ils ont aussi un pouvoir sur le film lui-même (pouvoir prouvé très explicitement au cours d’une scène mettant en vedette une manette de télévision… Je n’en dis pas plus).
L’intérêt d’écouter Funny Games n’est donc pas par-rapport au scénario. Oui, l’histoire est intéressante et prenante, mais il y a des dizaines d’œuvres d’invasions à domicile qui font l’affaire. Par contre, pour son intérêt critique et la réflexion sur notre relation à la violence qu’il suscite, Funny Games en vaut le détour.
La distribution est aussi très intéressante. Si Tim Roth n’éblouit pas par son jeu, Naomi Watts et Michael Pitt (l’un des ravisseurs), quand à eux, interprètent leur rôle avec un réalisme troublant. Le film, d’une durée de presque deux heures, s’écoule à une vitesse fulgurante, et la balance entre les scènes d’action et les dialogues percutants (c’est du Haneke, tout de même) est sublime.
Maintenant, faut-il écouter l’ancienne ou la nouvelle version? Habituellement, j’ai tendance à être puriste et à conseiller l’original. Cependant, les deux versions sont pratiquement identiques (sauf quelques différences par-rapport à l’ordre des évènements). Et comme les deux films ont été réalisés par le même homme, que les plans de caméra et le scénario sont les mêmes… Je n’ai pas vu l’original, je ne peux pas me prononcer. Mais Funny Games, version 2007, fait très bien le travail.
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