READY OR NOT
Le jour de son mariage, Grace (Samara Weaving) est invitée à participer à une tradition dans la famille de son mari (Mark O’Brien) avant d’être officiellement admise dans leur cercle. Cette coutume est simple : chaque nouveau venu doit jouer à un jeu déterminé au hasard. Et dans ce cas-ci, il s’agit d’une partie de cache-cache. Or, ce que la jeune femme ignore, c’est que ce jeu n’a rien d’un divertissement aux yeux de la famille Le Domas, puisqu’après le compte à rebours, chacun des membres de celle-ci a pour objectif d’éliminer la nouvelle mariée, et ce, peu importe les moyens pour y parvenir. Totalement laissée à elle-même, la jeune femme devra donc tenter l’inimaginable : survivre à cette partie de cache-cache jusqu’au lever du soleil. Car, selon les légendes, si la famille Le Domas ne réussit pas à tuer Grace pendant la nuit, une chose atroce risque de leur arriver.
Bien que son récit nous propose une prémisse assez morbide et un lot important de scènes de meurtres violents et particulièrement explicites, le nouveau film de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillet se révèle davantage une comédie qu’autre chose. De plus, même si la conjugaison horreur et humour est devenue une tendance de plus en plus courante au cinéma, on ne peut nier le fait que ces deux styles ne font pas toujours bon ménage. En revanche, dans le cas de Ready or Not, c’est une tout autre histoire. Chacune des séquences humoristiques ou découlant de l’horreur est habilement mise en scène et n’entraîne jamais de rupture de ton pendant le film, ce qui est assez rare de nos jours, surtout dans des œuvres de ce genre.
Ready or Not ne serait rien sans ses personnages. Tous aussi excentriques les uns que les autres, ils apportent une dimension très intéressante à la famille Le Domas. Qu’il s’agisse de la belle-sœur (Melanie Scrofano) adepte de la cocaïne, du valet obsédé par la musique classique (John Ralston), de la vieille tante folle (Nicky Guadagni) qui se promène constamment avec une hache dans ses mains, ou encore du frère du marié (Adam Brody) qui en a marre des traditions familiales, chacun réussit à briller à travers cette impressionnante distribution. Quant à la tête d’affiche du film, Samara Weaving, elle réussit sans effort à être attachante et drôle, grâce à son étonnante performance, mais aussi par les multiples épreuves riches en sensations fortes que doit surmonter son personnage.
Ainsi, grâce à son scénario efficace et à son mélange maîtrisé d’humour et d’horreur, Ready or Not est certainement l’un des films les plus surprenants de l’année. Rempli de scènes d’action et de meurtre complètement disjonctées, ce nouveau long-métrage signé Bettinelli-Olpin et Tyler Gillet est la preuve même qu’une histoire simple, mais bien exécutée peut donner lieu à un grand divertissement cinématographique.
Sortie en salles : 21 août 2019
Critique rédigée par Gabriel Miron
HOUSE OF THE HUMMINGBIRD
Un an après l’accession de la Corée du Sud à la démocratie en 1993, Séoul se développe à un rythme effréné et plusieurs peinent à maintenir la cadence. C’est le cas la famille Kim qui subsiste grâce à leur modeste commerce dans un quartier vétuste d’où l’on chasse les citoyens afin de le moderniser. Tout comme sa mère et sa sœur aînée, la discrète Eun-hee n’arrive pas s’affirmer au sein de ce foyer foncièrement patriarcal ignorant autant ses aspirations que les violences subies aux mains de son frère en qui tout est investi. Rêvant de devenir artiste, l’école ne lui apporte guère plus de réconfort. L’adolescente se rattache donc à sa meilleure amie Ji-suk et à ses amours volatiles, jusqu’au jour où une nouvelle enseignante, Young-ji, se présente à ses cours du soir. Femme libre et confiante, Young-ji prend Eun-hee sous son aile et lui enseigne bien plus que le mandarin — elle lui apprend à relever la tête pour enfin se faire respecter.
House of Hummingbird est avant tout un film coming of age assez classique dans la forme ; un récit initiatique où une jeune fille assez marginale, au sein de sa famille et de son école du moins, devra trouver sa voix et enfin s’assumer avec l’aide de modèles qui viendront l’inspirer. Mais le tout premier film écrit et réalisé par Kim Bora arrive à le faire avec tant d’honnêteté et de subtilité, notamment en situant son récit dans un contexte historique précis et en offrant un regard sensible sur la place des jeunes filles dans la société coréenne, qu’il en devient unique et profondément personnel. C’est donc le plus sobrement possible, sans prétention avec beaucoup de mélancolie que l’on suivra cette jeune Eun-hee. Alors que le système scolaire tente de rappeler l’importance de la réussite et de la carrière et que la routine, voire la survie, a remplacé l’empathie et l’écoute dans les familles, il est difficile, presque impossible pour une jeune fille isolée et négligée de voler de ses propres ailes.
Bien qu’on aurait aimé que la cinéaste et scénariste du film s’attarde un peu plus au contexte historique oppressant de cette époque ou aux autres membres de sa famille plutôt que de laisser toute la place à la jeune Eun-hee Kim, House of Hummingbird garde tout au long un immense respect pour chacun de ses personnages principaux comme secondaires. Le récit réussit la plupart du temps à nuancer la personnalité et les motivations de chacun en dévoilant leur quotidien et leurs problèmes personnels au bon moment tout en évitant que ça en devienne romanesque. Du père sévère, au frère violent, en passant par la professeure attentionnée, on se surprend à découvrir chez eux des parts insoupçonnées d’ombres comme de lumières. Malgré son côté lunatique attachant, on finit presque par comprendre pourquoi Eunh-ee n’est malheureusement jamais le centre d’attention des autres à travers leur routine oppressante et la pression sociale à devoir toujours performer. Elle-même victime de cette pression, ses émotions et épreuves qu’elle vit sont constamment refoulées ou rapidement oubliées. Bien que ce soit volontaire dans le récit, on peine à vraiment s’attacher ou s’identifier à cette jeune fille tant elle semble aussi peu transparente et beaucoup trop résiliente dans la première partie du film. En revanche, ce sont véritablement ces trop nombreuses scènes où elle s’efface complètement qui rendent son évolution au sein du film aussi émouvante et cathartique en deuxième partie.
House of Hummingbird prend alors tout son sens au moment où Eun-hee Kim commence enfin à comprendre sa place dans le monde et à s’assumer pleinement. Et cette transformation drastique mais authentique est d’autant plus satisfaisante et sentie grâce à l’interprétation absolument transcendante de Park Ji-hu (The Witness) toute en subtilité et avec beaucoup d’intelligence et de sagesse. En tant que véritables moments névralgiques du film, les nombreuses rencontres entre Eun-hee et la professeure Kim Youngji (Kim Saebuyk) sont les plus touchantes et sincères du film alors qu’elles commenceront à se reconnaître chacun dans l’autre. Leur chimie alors stupéfiante, on ne peut que louanger la direction d’acteurs de Kim Bora et toute la place qu’elle laisse aux acteurs aux moments cruciaux.
Le même traitement et la même qualité se ressentent également dans la réalisation et la mise en scène du film. Le tout est traité sans artifice et avec une minutie impressionnante pour un premier film alors qu’aucune scène ou même aucun plan ne semblent superflus. Il y a également quelque chose de chaleureux dans la mise en scène ainsi que dans la direction photo qui contraste et complimente à merveille avec le récit émotionnellement assez hermétique et austère par moment. On ne peut alors que ressentir une pointe d’espoir ainsi qu’une certaine nostalgie à l’enfance malgré ses épreuves si difficiles dans le regard de Kim Bora. (M. Blouin)
THE GANGSTER, THE COP, THE DEVIL
Un être mystérieux se balade en voiture la nuit dans la ville de Cheonan, en Corée du Sud, et se met à tuer des innocents au hasard sur la route. Dès lors, Jeong Tae-seok (Kim Mu-yeol), le policier qui est appelé à enquêter sur ces récents meurtres, soupçonne le criminel d’être nul autre qu’un tueur en série notoire, en raison des indices retrouvés sur chaque scène de crime. Un soir, Jang Dong-su (Ma Don-seok), le caïd d’une organisation criminelle associée aux machines à loterie, est attaqué par le meurtrier recherché, et ce, de la même manière que les victimes précédentes. Par miracle, le gangster réussit à échapper aux griffes du tueur. Un peu plus tard, le policier Jeong Tae-seok rend visite à Jang Dong-su pendant que celui-ci se rétablit de ses blessures, et lui offre de s’allier à lui pour mettre un terme au règne de terreur qu’impose le tueur en cavale. Mais ceci, à la seule condition que le premier qui réussira à mettre la main sur le meurtrier sera celui qui décidera du sort de ce dernier. En d’autres termes, si c’est le gangster l’attrape, il aura le droit de le torturer puis de le tuer comme bon lui semble; mais si c’est le policier qui l’arrête avant, ça sera à la justice de décider des conséquences.
The Gangster, the Cop, the Devil, de Lee Won-tae, correspond exactement à ce que l’on pourrait rechercher d’une superproduction coréenne. Des scènes d’action à la tonne, une histoire débordant d’humour noir et offrant de nombreux revirements de situation, et une excellente distribution. La partie du récit portant sur le tueur en série est peut-être le seul maillon faible du film. En effet, les motivations du tueur ne sont jamais vraiment expliquées, et ce dernier ressemble parfois un peu trop au meurtrier interprété par Kevin Spacey dans Seven (1997) de David Fincher. Ainsi, même si Kang Gyeong-ho interprète son rôle à merveille, on ne peut s’empêcher d’être un peu frustré par le manque de substance de son personnage.
En revanche, c’est tout le contraire en ce qui a trait à l’histoire du gangster et du policier. En effet, bien avant cette histoire de meurtres, les deux personnages n’avaient déjà pas d’atomes crochus, Kim Mu-yeol ayant tenté à plusieurs reprises de mettre un frein aux activités criminelles de Jang Dong-su. Ainsi, l’alliance plus qu’absurde entre ces deux êtres aux motivations aux antipodes nous donne droit à une multitude de séquences humoristiques et rocambolesques, notamment quand ces derniers essaient de mettre des bâtons dans les roues de l’un et l’autre pour arriver à leurs fins, même s’ils sont à la recherche du même homme. The Gangster, the Cop, the Devil est l’un de ces films qui nous rive sur le bord de notre siège du début à la fin. Il n’est donc pas surprenant qu’un remake américain soit déjà en route, et que Ma Don-seok, cette grande vedette de film d’action en Corée du Sud, soit pressentie pour tenir à nouveau son rôle de caïd.
Critique rédigée par Gabriel Miron
THE INCREDIBLE SHRINKING WKND
Le film espagnol El increíble finde menguante vient d’avoir sa première nord-américaine à Fantasia. Contrairement au penchant des amateurs du Festival pour les films de gore, le manga et la dramaturgie, nous avons ici un film beaucoup plus léger, racontant avec humour et poésie l’histoire d’une roue temporelle dans laquelle une jeune femme trentenaire se retrouve prisonnière. Explorant le concept narratif récemment vu dans la série Netlifx Russian Doll et dans les classiques que sont maintenant Edge of Tomorrow et Groundhog Day, le film de Jon Mikel Caballero sait toutefois tirer son épingle du jeu par une cinématographie simple et naturelle. De plus, ses personnages sont plus conventionnels, ce qui amène une intéressante touche de réalisme.
Nous suivons les mésaventures d’Alba (Iria Del Rio), qui part en week-end dans le chalet de son enfance avec un groupe d’amis afin de célébrer son anniversaire, elle qui aura bientôt 30 ans. La fête ne se déroule pas comme prévu: ses amis se montrent moqueurs envers elle et son copain la quitte la soirée même. Elle découvre bien vite qu’elle est prise dans un cercle temporel, l’obligeant à revivre cette même journée encore et encore. Petite différence toutefois : chaque nouvelle « loop » lui fait perdre une heure de plus dans sa journée. Prenant en compte ses déboires personnels et sa récente rupture, elle tentera de se redécouvrir elle-même et de réévaluer certaines interactions avec ses proches, plus précisément son copain Pablo (Adam Quintero) avant qu’il ne la quitte pour de bon.
Je dois admettre avoir bien apprécié ce petit film léger! En plus d’un beau scénario émotionnel et très réaliste, le réalisateur a su explorer l’art de la découverte personnelle et de l’amour par un concept de science-fiction, mais qui ne semble aucunement artificiel. Comme Russian Doll l’a si bien fait avant, Alba profitera de sa « malchance » pour en apprendre davantage sur ses proches de «loop» en «loop», mais aussi sur elle-même, voyant qu’elle pourrait davantage apprendre à se soucier des autres autour d’elle. Intéressant, je crois que si un film de Xavier Dolan rencontrait Groundhog Day, nous aurions un film comme The Incredible Shrinking WKND. Vous remarquerez aussi les choix artistiques au niveau du cadrage, utilisant un format 4 :3 qui rétrécit de plus en plus que la « loop » d’Alba se resserre, comme un petit polaroïd que l’on traine lors d’une fête d’amis. Xavier Dolan l’avait aussi fait pour le film Mommy, c’est très cool! Bref, le plus récent film de Jon Mikel Caballero est définitivement le «feel good movie» du Festival Fantasia 2019, et on s’y plait bien.
Critique rédigée par Frédéric Bourgeois-LeBlanc
AMERICAN FIGHTER
Je suis rentré dans la première projection mondiale de American Fighter du réalisateur Shaun Piccinino sans aucune attente ni information sur son récit. Bien souvent, assister à une projection sans trop d’informations contextuelles peut nous amener de très belles surprises. Généralement, je manque cruellement de culture cinématographique en regard à la boxe et aux arts martiaux. Soyez bien assis dans votre chaise, je dois admettre n’avoir jamais vu Rocky! J’ai donc brisé la glace à l’aide d’un film abordant les rings criminels d’arts martiaux aux États-Unis et…ce fut un rendez-vous presque complètement raté!
Nous sommes en Californie à l’été de 1981. Nous rencontrons le jeune Ali Jahani (George Kosturos), un immigrant iranien universitaire ayant fui son pays en révolution pour aller vivre avec son oncle aux États-Unis, laissant ses parents derrière. Un vrai cauchemar se concrétise lorsqu’il apprend combien lui coûtera de faire sortir sa mère de l’Iran, suite à l’assassinat de son père. Nécessitant une somme d’argent monumentale en demandant à un tierce partie d’intervenir pour assurer l’extradition de sa mère, il trouvera un moyen dangereux d’y parvenir. Particulièrement doué à la lutte lors de ses cours d’éducation physique, l’un de ses amis (Bryan Craig) l’introduira à un ring de combats singuliers, dirigé par un «gambler» écossais (Tommy Flanaghan, une légende ayant joué dans des films tels Sin City et Gladiator) où tous les coups sont permis, et ce en échange d’argent comptant. Avant de revoir sa mère, disons qu’il aura le visage plutôt ensanglanté.
Malgré un récit plutôt touchant, le manque de budget derrière ce film est beaucoup trop apparent, donnant lieu à un mauvais montage, un mélange de tons et de très mauvaises interprétations du côté des acteurs (sauf pour les deux acteurs de carrière, Tommy Flanaghan et Sean Patrick Flanery). Voyant le récit raconté sous deux tons parallèles, l’un comme une banale comédie collégienne où les gars pourchassent les filles, et l’un plus sombre et sanglant dans les rings de lutte, on saute du coq à l’âne constamment. Les combats chorégraphiés restent le seul élément intéressant du film, où les acteurs sont particulièrement doués, le reste n’est que du cliché kitsch et des répliques manquant cruellement d’intérêt et d’originalité. Dommage pour le réalisateur Shaun Piccinino, qui avait sûrement de bonnes intentions, mais son film est un vrai navet pour environ 60% de sa durée.
Critique rédigée par Frédéric Bourgeois-LeBlanc
THE ODD FAMILY: ZOMBIE ON SALE
The Odd Family : Zombie on Sale raconte l’histoire d’un jeune homme qui revient d’entre les morts, et qui arrive dans le petit village de Poongsan en Corée du Sud. Man‑duk (Park In-hwan), l’homme à la tête de la famille Park, tombe nez à nez avec le zombie (surnommé Jjong-bi), et se fait mordre directement à la tête par la créature assoiffée de sang et de chair fraîche. Or, au lieu de se transformer en zombie lui aussi, l’homme âgé retrouve miraculeusement sa vigueur d’autrefois, au plus grand étonnement des membres de sa famille. En d’autres termes, c’est comme s’il était tombé dans la fontaine de jouvence. Évidemment, la nouvelle se répand dans le village et, bientôt, tous ceux qui sont le moindrement âgés décident de payer le gros prix à la famille Park pour se faire mordre à leur tour par le même zombie qui a attaqué Man-duk. Dès lors, afin d’empocher assez d’argent pour se payer un voyage à Hawaï, le paternel décide de séquestrer la créature chez lui et de la forcer à mordre chacun des citoyens qui souhaitent « rajeunir ». Toutefois, sa cupidité entraînera tôt ou tard une marée de conséquences dévastatrices et mortelles. Entre autres, l’apparition de nouvelles hordes de zombies dans toute la ville.
Un peu comme le faisait Shaun of the Dead (2004), The Odd Family : Zombie on Sale réussit parfaitement à mélanger la comédie au registre des films de zombies, principalement grâce à sa prémisse des plus amusantes. En effet, dès que les membres de la famille Park se rendent compte que l’appétit du zombie peut être contrôlé en le nourrissant simplement avec des choux, ces derniers tentent presque tous de l’utiliser pour arriver à leurs propres fins. Dans le cas de Man-duk, on le sait, c’est pour se payer son fameux voyage, mais pour Min-gul (Jung Jae-young), par exemple, c’est pour le présenter à ses anciens patrons afin de retrouver son emploi et de se créer une fortune sur le dos du reste de sa famille.
Or, là où The Odd Family : Zombie on Sale parvient aussi à nous surprendre, c’est dans ses nombreuses séquences d’action complètement délirantes auxquelles on assiste principalement au dernier tiers du récit. En fait, dès le moment où les hordes de zombies terrorisent les rues de Poongsan, puis le domicile des Park, le film nous propulse dans une véritable course contre la montre remplie d’émotions fortes et de scènes toutes aussi absurdes les unes que les autres. Par exemple, rien ne vous émerveillera davantage que de voir un zombie se faire électrocuter sur un toit et lever les bras dans les airs, tel un DJ, invitant ainsi des centaines d’autres à en faire autant, pendant qu’on entend de la musique électronique à tue-tête. Bref, vous comprendrez certainement que le film de Lee Min-jae est un excellent divertissement qu’il ne faut pas prendre au sérieux.
Critique rédigée par Gabriel Miron
AQUASLASH
Il était une fois de jeunes adultes écervelés et dépourvus de tout discernement qui décident d’organiser une soirée dans un parc aquatique miteux, pour célébrer la fin de leurs études. Avec pour thématique les années 80, cette soirée « sexe, drogue et rock’n’roll » représente le moment idéal pour chacun d’entre eux de faire la fête comme si demain n’existait pas. Dans leur tête, cela signifie aussi qu’ils peuvent insulter littéralement tous ceux et celles qu’ils croisent sur leur passage, incluant les pauvres employés du site. Or, ce que ces jeunes idiots ignorent, c’est qu’un mystérieux psychopathe se cache parmi eux. Tôt ou tard, ces derniers seront malencontreusement victimes du sabotage d’un manège aquatique qui se révélera mortel et sanguinaire!
Après une heure où l’on voit des personnages désagréables s’insulter entre eux, s’ébattre sexuellement avec tout ce qui bouge, consommer des doses incalculables de cocaïne, ou simplement se comporter comme des abrutis de la pire espèce, il devient difficile d’apprécier Aquaslash. Et ce, même si les scènes d’horreur qui arrivent principalement à la fin du film demeurent somme toute spectaculaires. De ce fait, bien que les effets spéciaux des Blood Brothers et de Remy Couture constituent l’un des principaux points forts du nouveau long-métrage de Renaud Gauthier, on ne peut s’empêcher d’être complètement ennuyé par son scénario des plus juvéniles.
Saluons quand même le fait qu’il s’agit d’une production québécoise, et qu’il est nécessaire d’encourager le « cinéma de genre » d’ici. Toutefois, même si Aquaslash se veut un hommage à la culture cinématographique et musicale des années 80, on ne peut nier le fait que cette œuvre est dépourvue de toute originalité, en plus de nous servir un récit dont le regard porté sur la femme est si dégradant, que l’expérience de visionnement en salle devient souvent malaisante. Au final, quelques peaufinages scénaristiques et une distribution strictement francophone auraient certainement aidé Aquaslash à être un film d’horreur québécois beaucoup plus intéressant et, surtout, mémorable.
Critique rédigée par Gabriel Miron
THE CROW
Pour l’occasion de Fantasia 2019, le classique du cinéma gothique The Crow (1994), réalisé par Alex Proyas, a été projeté en 35mm pour célébrer le 25e anniversaire de sa sortie au cinéma. Je dois admettre, j’ai commencé à m’intéresser au phénomène depuis peu, ayant vu le film pour la première fois il y a seulement quelques mois. De manière assez surprenante, ce film a bénéficié d’une notoriété marquée auprès d’un grand réseau de fans, non pas seulement pour son genre et ses scènes d’action, mais plus encore pour toute l’horreur vécue sur le plateau. En effet, si vous ne le saviez pas déjà, The Crow est la seule production cinématographique à ce jour ayant vu son principal protagoniste être littéralement tué par erreur sur le plateau. L’acteur et cascadeur Brandon Lee , fils du célèbre Bruce Lee, a malheureusement perdu la vie lors d’une cascade qui a mal viré (une vraie balle logée par accident dans le chargeur d’une arme de point), rendant ce malheureusement célèbre.
On parle souvent de productions telles que Apocalypse Now, Blade Runner ou encore Bram Stocker’s Dracula à titre de tournages excessivement difficiles, mais il va sans dire que The Crow remporte la palme d’or. Malgré tout, ce film est aussi un chef-d’oeuvre par son genre gothique semi-gore et son antihéros mémorable, même à ce jour.
Le film raconte l’histoire assez inattendue de Eric (Brandon Lee), qui revient parmi les vivants après avoir été sauvagement assassiné, lui et sa copine, par un gang de criminels. Son âme maintenant connectée avec celle d’un corbeau (un peu comme Bran dans Game of Thrones), il profite de sa renaissance pour prendre sa revanche sur les malfrats responsables de sa mort. Honorant son amour du «rock and roll» et du théâtre, il portera le masque du corbeau, un maquillage blanc muni d’un long sourire et d’un costume moulant noir. Vite comme ça, on dirait le guitariste du groupe Kiss en cavale dans les rues de New York à minuit le soir. Basé sur une bande-dessinée, ce film est sombre et plutôt violent, ce qui devrait faire saliver les amateurs de Tim Burton ou Rob Zombie.
Somme toute, pour les non-initiés qui tolèrent assez bien les films sombres et plutôt déprimants, c’est un classique qu’il ne faut pas manquer. Je le recommande d’ailleurs lors d’une nuit d’automne au mois d’octobre! Malgré un montage un peu saccadé suivant la mort de Brandon Lee, le film se tient bien à ce jour par son personnage emblématique et ses scènes d’action plutôt enlevantes. Mon petit doigt me dit que les réalisateurs de The Matrix ont été inspirés par ce film. Prenons le temps de nous souvenir de Brandon Lee, cet acteur assez remarquable qui a donné sa vie pour ce rôle.
Critique rédigée par Frédéric Bourgeois-LeBlanc
THE LODGE
Les choses ne vont pas très bien pour Aidan (Jaeden Martell) et Mia Marsh (Lia McHugh). À la suite d’une tragédie familiale des plus choquantes, leur père (Richard Armitage) les force à passer Noël dans un vieux chalet situé au beau milieu d’une forêt enneigée, en compagnie de Grace, leur nouvelle belle-mère (Riley Keough). Et comme si ce n’était pas assez, les deux enfants découvrent une sombre vérité concernant cette dernière. En effet, celle-ci est l’unique survivante d’un suicide collectif ayant été orchestré par son père dans une secte religieuse, alors qu’elle n’était encore qu’une adolescente. Ainsi, l’idée d’être enfermés avec elle n’enchante pas du tout Aidan et Mia, et ce, encore moins quand ils apprennent que leur père doit s’absenter pendant quelques jours pour son travail. Or, au moment même où Grace tente de tisser des liens avec les deux enfants, une série de phénomènes étranges et terrifiants s’abattent tout d’un coup sur eux. Les journées se refroidissent, la génératrice ne semble plus fonctionner, presque tous leurs biens personnels disparaissent comme par magie, forçant ainsi les démons de chacun à faire surface.
Le nouveau film de Severin Fiala et Veronica Franz, le duo autrichien derrière Goodnight Mommy (2014), est pratiquement impeccable quant à sa réalisation. L’atmosphère froide et horrifiante qui règne sur le chalet et sur chacun des personnages et les performances convaincantes des comédiens rendent plusieurs séquences fortes en émotions totalement saisissantes, mais nous rappellent parfois des œuvres explorant des situations similaires telles que The Shining (1980) de Stanley Kubrick et Hereditary (2018) d’Ari Aster.
Toutefois, quelque chose d’extrêmement frustrant se dégage de The Lodge. En effet, le film propose non seulement très peu de revirements de situation, mais la plupart d’entre eux ruinent littéralement l’histoire si habilement mise en place lors du premier acte. Qu’il s’agisse des décisions irrationnelles des personnages qui déconstruisent sans l’ombre d’un doute le développement psychologique de chacun d’eux, ou encore des réponses qui arrivent plus tard au sujet des phénomènes étranges ayant frappé la famille Marsh, le nouveau film de Severin Fiala et Veronica Franz perd toute sa crédibilité pendant son dernier tiers. Et cela est bien dommage! Au final, The Lodge se révèle n’être rien de moins qu’une œuvre accablante, frustrante et dépourvue de toute logique narrative.
Critique rédigée par Gabriel Miron
Le festival Fantasia se déroulait du 11 juillet au 1er août 2019. On vous remercie de nous avoir suivis, et on se donne rendez-vous l’année prochaine pour notre couverture de l’édition de 2020!
Crédits photos/vidéos/synopsis : Fantasia, Welgo USA, IMDB