La 20e édition du Festival International de Films Fantasia étant déjà terminée, l’heure est donc maintenant au bilan. Quelques 60 longs-métrages, 70 cours-métrages, de la réalité virtuelle, de magnifiques rencontres, du Pop-Corn comme repas, des miaulements et bien trop de films manqués que nous nous dépêcherons de rattraper. Voici donc les coups de cœur de Ton Canapé!
Les Meilleurs Long-métrages
As the Gods Will
Que serait une année Fantasia sans Takeshi Miike? Son nouveau film As the Gods Will, à des milles de ses classiques comme Audition ou Dead or Alive, est une comédie romantique qui mélange avec aplomb Battle Royale et des jouets et objets de la culture japonaise. Le talent de Takashi Miike se prouve une fois de plus alors qu’il réussit à merveille à mélanger ces jeux violents à une histoire d’amour des plus clichés toute fois charmante et le tout, sans aucun temps mort. Le montage et la réalisation extrêmement rythmés et soignés et l’humour omniprésent permettent à As the Gods Will d’être des plus divertissants et originaux. Sa violence gore, qu’on pourrait qualifier facilement de festive, en fait également une expérience inoubliable. 8/10
Baaghi
Baaghi est l’exemple parfait d’un film d’action Bollywood; des scènes d’action à couper le souffle, des chorégraphies impressionnantes sur de magnifiques chansons indiennes (mais très américanisés) et une histoire d’amour dont on ne peut qu’être jaloux. Si la première moitié du film se veut peut-être moins réussis; un amour qui existe grâce à la pluie, des tonnes de flashback douteux, et de nombreux montages à la Karate Kid, la deuxième moitié offre un spectacle des plus impressionnants. Les combats qui défient bien sûr les lois de la physique sont mis en scène avec beaucoup d’imagination, changeant de styles d’art martiaux et se renouvelant constamment. Le combat final durant plus de 20 minutes est absolument saisissant et savoureusement violent, alors que Ronny doit sauver sa douce de son ravisseur (qui apparait chaque fois sur le thème de Bowser!) au dernier étage d’une tour, un peu à la manière de Raid, où chaque étage est une épreuve en soit. Ajoutez à tout ça un humour discutablement hilarant et vous obtenez Baaghi, l’un des meilleurs films d’action du 20e de Fantasia! 7/10
Bakuman
Loin d’être sous mon radar lors du dévoilement de la programmation, cette comédie autour du manga, sa création et son industrie me semblait réservé qu’aux érudits de ce style de bande-dessinés. Tout au contraire, Bakuman se veut certes une lettre d’amour extrêmement riche sur cet art, mais aussi une œuvre unique et original qui plaira à tous les cinéphiles. L’histoire, aussi hilarante que captivante (adaptée du manga du même nom) de ces deux étudiants décidés à créer leur propre manga pour pouvoir publié chez Shonen Jump est magnifiquement mis en scène par Hitoshi Ohne qui insuffle à Bakuman énormément de dynamismes et d’inventivité, notamment grâce aux scènes mélangeant les héros du films et le manga qu’ils tentent de créer. Les nombreux revirements, le montage rythmé et les dialogues intelligents et mordants permettent à Bakuman d’être passionnant et divertissant sans aucune longueur. Malgré les personnages quelque peu excentriques et sa mise en scène haute en couleur, Hitoshi Ohne réussit toute fois à humaniser ses personnages tous très attachants et à rendre crédible l’industrie du manga, rendant le récit touchant et déchirant par moment. Pratiquement sans défaut, Bakuman est une œuvre unique et captivante qu’il ne faut pas manquer. 9,5/10
Before I Wake
Dernier film de Mike Flanagan (Oculus, Hush), Before I Wake est dans la directe continuité du reste de sa filmographie. Dans un désir d’explorer le deuil à travers le cinéma de genre, Flanagan utilise l’horreur en tant que moyen pour extérioriser le côté sombre présent en chacun de nous. Suite au décès de leur fils, Jessie et Mark décident d’adopter Cody, un jeune garçon au don bien particulier; celui de rendre ses rêves et, par le fait même, ses cauchemars tout à fait réels. C’est à travers cette prémisse intéressante que le film abordera une variété de thèmes différents, et ce, avec une grande sensibilité. Rappelant grandement la démarche du Labyrinthe de Pan de Guillermo Del Toro, Before I Wake réussit son pari d’être, avant tout un drame humain , mais qui est toutefois fortement teinté de moments horrifiques — moments généralement plutôt aboutis d’ailleurs. Même si le film de Flanagan ne risque pas de marquer le monde cinématographique comme celui de Del Toro, sa dernière proposition demeure très bonne et mérite définitivement d’être vue si vous êtes fans du genre. 7/10
Creature Designers: The Frankenstein Complex
Ayant été abordé dans notre premier récapitulatif, Creature Designers demeure, après trois semaines de festival, l’un des meilleurs documentaires de la programmation. Retraçant l’histoire du métier de concepteur de monstre, ce film à la « geekitude » assumée nous plonge dans une centaine d’années de cinéma monstrueux, et ce, à travers des figures mythiques du milieu. Un véritable hommage à l’art de la création de monstre, Creature Designers est une oeuvre qui entretient la flamme en chacun de nous. Pour plus amples informations concernant le film, ou bien la conférence de Guillermo Del Toro ayant suivi la projection de celui-ci, nous vous invitons à lire notre récapitulatif de la première semaine. 7.5/10
Don’t Breathe
Inutile de tourner autour du pot, ce film est une sacrée claque. La prémisse de Don’t Breathe est pourtant simple: trois voleurs pénètrent dans la maison d’un vieil homme aveugle dans le but de dérober sa pension de vétéran. Sur place, ils découvrent rapidement que celui-ci n’est pas aussi sans défense qu’ils l’auraient cru. Réalisé par Fede Alvarez (Evil Dead 2013), Don’t Breathe est une véritable leçon de cinéma d’horreur. Manipulant le spectateur de main de maitre, Alvarez nous plonge dans un monde brutal où la terreur côtoie le suspense à merveille. Une fois de plus, le cinéaste emploie sa caméra de manière à procurer une expérience viscérale et profondément angoissante. Naviguant entre la subjectivité pure et une omniscience procurant des informations cachées du regard des personnages, la direction de la photographie ne manque pas de panache et de créativité. Une réalisation millimétrée, un scénario surprenant au plus haut point, un méchant vachement effrayant, tout y est. À voir à tout prix. 9.5/10
Embers
Imaginez si un jour, nous perdions tous la mémoire. Tout souvenir de notre enfance, heureux comme malheureux, et même des choses plus anodines comme la saveur d’une pêche ou notre propre nom. C’est l’idée que Embers de Claire Carré réussit à explorer de manière aussi touchante que mystérieuse. Aussi frustrant qu’intéressant, on assiste à ces personnages recommencer leur vie chaque jour alors qu’ils perdent complètement la mémoire à chaque réveil dans ce monde postapocalyptique. D’avantage un récit poétique qui tente d’explorer les thèmes entourant la perte de la mémoire et la confiance qu’une réelle intrigue avec une finalité, on ne peut qu’être ému devant tant de naïveté; l’ensemble de la distribution jouant parfaitement ce sentiment de découverte et de candeur, comme si nous regardions en fait des enfants en apprentissage. La réalisation épurée et ensorcelante de Claire Carré créé également de magnifiques moments qu’il vous sera impossible à oublier, fin du monde ou pas. 9/10
Hunt for Wilderpeople
Prenez le film de Pixar Up, ajoutez-lui un peu de sang, un décor et des personnages néo-zélandais, une réalisation chirurgicale à la Wes Anderson, un montage rythmé à la Edgar Wright et vous obtiendrez le magnifique Hunt for the Wilderpeople. Réalisé par l’unique Taika Waititi (l’hilarant What we do in the shadows, Boy et le prochain Thor : Ragnarok), cette comédie d’aventure met en vedette l’excellent Sam Neil (Jurassic Park) dans la peau du vieil homme grincheux, mais attachant, et Julian Dennison, un petit nouveau, qui vole complètement la vedette avec Ricky Baker, ce jeune garçon délinquant et désagréablement charmant, adepte de haïku et dont la « gansta life » a choisi. Taika Waiti opte bien sûr pour la comédie, en nous offrant un film hilarant de la première seconde au générique de fin, multipliant les références à la culture populaire, les personnages éclatés et des situations aussi absurdes que touchantes. Sa réalisation méticuleuse et somptueuse se mariant à merveille avec l’envoutante trame sonore de Moniker et les décors magnifiques de la Nouvelle-Zélande, Hunt for the Wilderpeople est sans l’ombre d’un doute l’un des meilleurs films de l’année. Un film « majestical »! 9/10
I Am Not A Serial Killer
« Every town has its monsters ». C’est dans cet univers aux recoins sombres et inquiétants que nous plonge I Am Not A Serial Killer, film mettant en vedette Max Records et Christopher Lloyd. Adapté du roman du même nom, ce thriller aux tendances surnaturelles inattendues raconte l’histoire de John, un jeune sociopathe tentant de retrouver un tueur en série terrorisant une petite ville du Midwest. Filmé en 16mm, I Am Not A Serial Killer est une oeuvre qui cultive l’originalité par sa mise en scène rudement créative et son scénario aux habiles rebondissements. Par son ambiance glauque, son protagoniste à l’unique étrangeté, sa musique magnifiquement lugubre et son antagoniste singulier et bizarroïde, ce remarquable film au mince budget de 1,4 millions de dollars prouve que l’inventivité est l’unique ingrédient nécessaire à tout bon film de genre qui se respecte. 8.5/10
Kidnap Capital
Le premier long métrage de Felipe Rodriguez est bien loin d’être un divertissement léger. Viscérale à la manière d’un The Experience ou Hunger, Kidnap Capital est une épreuve en soi à regarder, où des immigrants qui tentent de passer illégalement la frontière en Arizona se font kidnapper par les membres d’un cartel mexicain qui les séquestreront dans plusieurs « drop houses » puis les dévêtiront et les torturont dans le but d’en récolter une rançon. La réalisation claustrophobique de Rodriguez centrée sur l’humain derrière cette histoire malheureusement bien réelle et actuelle et le caractère aussi violent qu’impulsif des ravisseurs procurent à Kidnap Capital une intensité pratiquement insoutenable. L’ensemble de la distribution offre une performance des plus convaincantes rendant Kidnap Capital un cauchemar plus vrai que nature. Une œuvre essentielle pour connaitre cette triste réalité avant les prochaine élections américaines. 8/10
King Dave
Adapté de la pièce de théâtre du même nom par Alexandre Goyette, King Dave est un chef-d’œuvre technique absolument époustouflant. Sa trame narrative simple, mais riche en émotions permet qu’on s’attarde surtout sur Dave, ce personnage impulsif, crédule qui se met constamment les pieds dans les plats. Le jeu d’Alexandre Goyette, ici d’un talent inouï, est à mi-chemin entre la théâtralité, la narration et le réalisme, rendant cette œuvre complètement unique. Cependant, l’aspect le plus épatant de King Dave demeure sa réalisation et sa mise en scène. Podz aurait pu facilement tomber dans la simplicité et offrir un plan-séquence statique plus près du théâtre. Or, il se préfère à manipuler constamment le temps, l’espace, les décors et les personnages de manière extrêmement fluide et inventive. On ne peut que se sentir berner par le gars de vues à chaque scène et n’être que stupéfait. Le Québec n’a absolument rien à envier aux Iñárritu de ce monde. 9/10
The Lure
À Fantasia, on adore énormément être secoué et être sorti de nos pantoufles avec des œuvres originales et innovatrices. The Lure, ne serait-ce que par son mélange éclectique de genres; une comédie musicale disco, avec de l’horreur, de la comédie et de l’amour, est sans aucun doute de cette catégorie. Un cabaret de variétés vient tout juste d’engager deux femmes qui tourneront assurément les têtes et chavireront le cœur de tous ceux collés à leurs lèvres, c’est-à-dire, deux magnifiques sirènes, assoiffées de sang et d’amour. Malgré la prémisse originale et le mélange de genres, la réalisatrice Agnieszka Smoczynska réussit bizarrement à rendre The Lure extrêmement crédible et captivant grâce à un scénario aux thématiques profondes beaucoup plus humaines que cette fable le laissait paraitre. La bande sonore ainsi que les chansons vous resteront longtemps dans la tête, alors que la réalisation extrêmement maitrisée et colorée confèrent à The Lure une ambiance aussi envoutante que le chant des sirènes. 8,5/10
They Call Me Jeeg
Si l’on exclut certains films Bollywood, Guillaume Lemay-Thivierge et quelques films asiatiques, le marché cinématographique des superhéros est monopolisé depuis bien longtemps par les Américains. They Call me Jegg, du réalisateur italien Gabriele Mainetti apporte au genre un vent de fraicheur franchement bienvenue. Sans être une adaptation d’une bande dessinée, son scénario s’inspire que très peu de la série animée japonaise Steel Jeeg. Malgré une trame narrative fort convenue, toute fois écrite avec beaucoup d’intelligence, qui répète bien sur les clichés du genre (l’origine, les pouvoirs, le supervilain, etc.), Gabriele Mainetti apporte à ses personnages originaux et à sa mise en scène inventive une touche beaucoup plus réaliste et humaine sans pour autant négligé les impressionnantes scènes d’action plus près du Bourne que du Superman. L’Italie, ou plus précisément Rome, magnifiquement mis en image grâce à une somptueuse direction photo, est finalement le terrain de jeu idéal pour ce film de superhéros aussi original que palpitant. 8,5/10
Yoga Hosers
Que dire de Kevin Smith. Étant un véritable passionné du monde « geek », il est difficile de séparer l’homme de l’oeuvre. De Clerks, en passant par Jay et Silent Bob, jusqu’à l’étrange Tusk, la filmographie Smith est, comment dire, spéciale. Yoga Hosers n’est en aucun cas l’exception à la règle. Gorgé de blagues canadiennes, de Nazis et de yoga, le dernier bébé de Kevin Smith est un sacré bordel qui fait chaud au coeur. Les deux protagonistes volontairement typées à fond la caisse portent le film à merveille et forment un duo humoristique assez efficace. Sans oublier la présence de Johnny Depp (oui, oui), interprétant le québécois Guy Lapointe, qui encore une fois, brille par son excentricité et son extravagance. Une pure partie de plaisir disjoncté, un divertissement haut en couleur et de l’absurdité entièrement assumée, voilà ce qu’est Yoga Hosers. Si vos yeux s’écarquillent à la mention de « Canadian Hitler » et bien ce film est pour vous. 8/10
Fantasia nous reviendra l’année prochaine pour sa 21e édition que l’on espère aussi éclectique que sublime. D’ici là, ils nous restent qu’à rattraper Train to Busan, We are the Flesh, Feuilles Mortes, Mon Ami Dino et bien d’autres. Et vous, quels ont été vos coups de cœur du 20e de Fantasia?
Crédit Photos : Imdb