Almodovar, pourquoi je ne t’ai pas connu avant?
Bien sur, j’avais déjà entendu ton nom à quelques reprises. Volver, Tout sur ma mère… Mais ça m’aura finalement pris le film Parle avec elle (Hable con ella) pour attiser ma curiosité. Et quelle chance j’ai eue! C’est donc en l’honneur de Parle avec elle que je parle aujourd’hui avec toi. Très bon concept, je sais, j’en suis très fier.
Pourquoi ai-je été attiré par ce film? Il faut dire que la pochette y est pour beaucoup. L’image des deux femmes ressemblant étrangement au Persona de Bergman aura attiré mon attention. Mais heureusement, ton film était bien plus compréhensible (et accessible) que l’œuvre des années 60.
Ton scénario, mon cher Almodovar (tu permets sans doute que je te tutoie, nous sommes bons amis maintenant que tu m’as fait vivre tant d’émotions), prouve ta longue expérience dans le milieu. Deux hommes développent une amitié quelque peu étrange lorsque leurs amoureuses respectives tombent dans un coma et qu’ils attendent longuement leur réveil dans deux chambres voisines. Très intéressant. Mais que l’un de ces hommes, Benigno (Javier Camara) continue d’entretenir une liaison amoureuse avec sa partenaire qui est maintenant dans un sommeil profond, c’est bien mieux. Surtout que la relation entre ces deux personnages (dont un seul est conscient) est si bien amenée qu’on y croit presque.
Oui Almodovar, nous nous le cacherons pas, l’amour avec un sujet inanimé a déjà été exploité plusieurs fois au cinéma. Je pense notamment à Lars and the real girl ou le plus récent Her, pour n’en nommer que quelques uns. Mais si ces œuvres apportent l’amour impossible d’une manière quelque peu absurde et comique, tu parviens à rendre ton film tellement humain que l’on croit réellement à cet attachement, à cet amour étrange qui s’agence si bien avec la fraternité des deux hommes.
Parle avec elle, c’est le conseil que Benigno donne à son nouvel ami lorsqu’il ne sait pas comment réagir devant sa femme inconsciente. Parle avec elle, c’est tout ce que Benigno sait faire pour prouver (ou se prouver) l’amour qui l’unit avec la femme de sa vie. Mais avec ton film, Almodovar, tu réussis également à nous parler, nous inspirer.
Bien sur, la distribution permet de le rendre encore plus mémorable. Le personnage de Benigno est assez complexe, mais Camara le rend à merveille. C’est aussi le cas de Dario Grandinetti qui, dans son interprétation de Marco, a un jeu plus sobre et discret, mais très efficace. Les deux femmes, quand à elles… Eh bien, elles jouent bien leur coma. Elles auraient peut-être pu être plus attachantes, mais on leur pardonne. Mention honorable à Geraldine Chaplin (oui oui, la fille de Charlie!) qui apparaît pour quelques minutes dans ton film.
Almodovar, tu as réussi à me faire vivre toute une découverte. Parle avec elle est probablement le film qu’il faut voir pour commencer à te connaitre. J’adhère complètement à l’obsession et aux problèmes humains de tes personnages, tant ils sont bien amenés par un scénario béton qui ne contient au final que très peu de failles (un léger manque de rythme dans certaines scènes, mais c’est un détail, vraiment, ne m’en veux pas). Au moins, ces quelques longueurs sont sauvées par des segments dont la réalisation et la trame narrative coupent complètement le film. Par exemple, le segment symbolique en noir et blanc avec un homme haut comme une pomme découvrant les plaisirs de la chair avec une femme de taille normale. Je ne sais pas où tu as pris ça, mais tes rêves doivent être très spéciaux! Merci pour ces rires et ces mimiques d’incertitude à quelques reprises.
Parle avec elle est donc un très bel hommage à la solitude de deux hommes amoureux (à différents degrés!). Et en effet, à la fin de mon écoute, je me suis étrangement senti seul. Je crois bien m’accompagner de quelques uns de tes autres films, en espérant qu’ils arrivent à la taille de celui-ci!
http://www.youtube.com/watch?v=g3O_1ToFIxk
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