C’est cette semaine que sort enfin le 13e film du Marvel Cinematic Universe et premier film de la Phase 3, Civil War, attendu depuis longtemps par les adeptes de la bande dessinée du même nom. Par contre, est-ce que le film est aussi tant attendu par le public en général? Trop de films de superhéros qui se ressemblent selon certain, le nouveau Captain America fait suite à Age of Ultron qui n’avait pas été unanime, et surtout, tout récemment à Batman v Superman, qui lui avait été unanime, mais négativement. D’Iron Man à Ant-Man, a-t-on fait le tour? Absolument pas!
Si on compare sans cesse l’univers DC à celle de Marvel, on ne peut passer sous silence la comparaison entre Captain America : Civil War et Batman v Superman : Dawn of Justice. Au plus simple, deux héros iconique qui s’affrontent sur fond de questionnement et de révolte sur les dommages collatéraux qu’ils font en essayant de sauver le monde. Si BvS avait gâché cette prémisse en complexifiant inutilement (et en l’abrutissant bizarrement aussi) son scénario, le troisième opus de Captain America réussit à offrir une histoire intelligente, profonde et surtout divertissante.
Après une intervention à Lagos, au Nigeria, qui a mal tourné et a fait de nombreuses victimes collatérales, les instances gouvernementales proposent d’encadrer les actions des Avengers et des autres superhéros grâce à un registre voulant faire d’eux des agents de l’État. À leur tête, Steve Rogers/Captain America, refuse d’abandonner cette indépendance si chère au groupe, elle seule pouvant être garante d’une justice désintéressée et d’une véritable protection de la population. Lorsque Tony Stark/Iron Man, dont l’influence est toujours vive sur les autres superhéros, décide de signer un accord avec les gouvernements, l’affrontement devient inévitable. D’aucuns, comme Natasha Romanoff/Black Widow se rangent derrière Tony Stark, tandis que d’autres choisissent de rester fidèles au Captain America qui tente de retrouver son ami de toujours, Bucky, le Winter Soldier.
Ayant plus les airs d’un Avengers à grand déploiement que d’un stand-alone plus épuré, le scénario de Christopher Markus et Stephen McFeely (The Winter Soldier et les prochains Infinity War) réussit toutefois à demeurer très réaliste et profondément humain. Les personnages n’ont jamais été aussi crédibles et habités; chacun des personnages a ses convictions propres et son évolution au sein du film, et on se surprend à passer du Team-Cap à Team-Iron Man, et vice-versa, tant les deux parties ont des valeurs différentes, mais très pertinentes. Loin d’être qu’un conflit politique, le scénario de Civil War réussit également à mélanger plusieurs histoires, tous intéressantes, et plusieurs personnages avec beaucoup d’habileté et sans qu’on s’y perde. Alors que ce nouveau registre réussit à scinder la famille des Avengers, Winter Soldier est recherché par les autorités et par les agents du Shield. Il n’est plus le Bucky qu’a connu Steve Rogers et il n’est plus le Winter Soldier, meurtrier et formaté par l’Union soviétique; il est entre les deux et Captain America en est persuadé et semble prêt à tout pour le sauver des griffes de Black Panther. En plus de tout ça, Helmut J. Zemo, qui n’est plus Baron, tente aussi de nuire aux Avengers. Le personnage interprété par Daniel Brühl (l’énervant Fredrick Zoller dans Inglourious Basterds) honore encore une fois la malheureuse tradition Marvel à offrir des vilains plus ou moins mémorables à des acteurs d’envergure et de grands talents. Heureusement, Zemo évite les clichés du plan machiavélique de destruction massive ou d’invasion planétaire. Malgré sa présence très limitée et peu effrayante, son objectif est simple, efficace et exotiquement très humain dans le contexte de l’univers Marvel. Bien sûr, malgré que l’emphase soit davantage mise sur le conflit plutot dramatique entre Team-Cap et Team Iron Man, on retrouve toujours la dose d’humour extrêmement efficace dont les studios Marvel sont passés maîtres.
Civil War fait aussi honneur à ses prédécesseurs en terme d’action. La réalisation des frères Russo, Anthony et Joe, qui nous avaient donné Captain America : Winter Soldier, le meilleur Marvel à ce jour, y est pour beaucoup. Les combats sont violents, incisifs grâce au montage rythmé et serré, et chorégraphiés avec beaucoup d’imagination et d’habileté. Il faut dire que sans toute la gravité du conflit et sans le facteur émotif, les combats seraient beaucoup moins efficaces et intéressants à regarder, contrairement par exemple à un certain film de Zack Snyder. Le film place également ses scènes d’action au bon endroit, créant un crescendo à chacune de ses scènes à la différence de Age of Ultron, qui s’introduisait avec la meilleure scène d’action du film et dont tous les combats suivant se suivaient et se ressemblaient. Civil War débute donc avec un combat homme à homme enlevant entre Captain America et Crossbones pour enchainer vers une bataille entre policiers et superhéros puis une poursuite intense entre Black Panther et Bucky, et ainsi de suite. On enchaine donc scène après scène en ajoutant plus d’héros, plus d’explosions, plus de tensions. On ne se lasse donc jamais, et chaque combat est plus impressionnant les uns après les autres.
La scène de l’aéroport qui oppose les deux équipes est sans aucun doute le point culminant et tout simplement le meilleur combat de superhéros jamais montré au grand écran. Le genre de scène qu’on fantasmait de voir au cinéma depuis toujours où chacun des héros à son moment de gloire. Notre cœur de petit garçon est émerveillé et on change même de héros favori à chaque instant. Même le parfois anodin Hawkeye a son moment de grâce en donnant un voyage express à Ant-Man (qui a quelques nouveaux pouvoirs qu’on espérait voir enfin), ou en donnant une leçon à Iron Man par exemple. La scène entière se veut particulièrement mémorable puisqu’elle mélange avec brio un humour parfait malgré la douloureuse réalité de cette scène épique. Quant au combat final, on évite le dénouement habituel où tout est plus grand que nature, plus explosif et qui amène souvent à encore plus de dommages collatéraux (merci Doomsday). On a donc droit à une finale plus intime et personnel entre Captain America sans pourtant mettre en jeu la tension dramatique et l’aspect épique du film. Au final, les effets spéciaux sont encore une fois irréprochables et pratiquement invisibles.
Personnellement, c’est l’aspect que j’attendais le plus avec autant d’excitation que de réticence. Alors que la première moitié du film se veut plutot sérieuse, voila qu’on nous présente enfin notre « friendly neighborhood » dans une scène hilarante où Tony Stark lui rend visite (et à sa tante) dans le quartier Queens. Du haut de ses 16 ans, timide, mais arrogant, ce Tom Holland est, et je ne pèse pas mes mots, le meilleur Spider-Man à ce jour. Les scénaristes ont exactement compris le Peter Parker/Spider-Man des bandes dessinées, le costume est parfait et chacune de ses répliques où il évacue son anxiété en parlant sans arrêt vous fera baver d’impatience pour Spider-Man : Homecoming en 2017. Parmi les nouveaux venus, Black Panther/T’Challa, campé avec beaucoup d’assurance et de charme par Chadwick Boseman (Get on Up, 42) dans son magnifique costume est aussi particulièrement bien transposé à l’écran et surtout introduit dans l’univers avec plus de subtilité qu’un dossier secret Lexcorp de vidéos secrets. Encore une fois, la totalité des acteurs offre une performance impeccable, à commencer par Chris Evans, qui personnifie ici Steve Rogers à la perfection et Robert Downey Jr., plus émotif, et moins pince-sans-rire qu’à l’habitude, mais tout aussi parfait dans la peau de Tony Stank. Personnifiant le troublé Bucky Barnes, Sebastian Stan est quant à lui remarquable, extrêmement crédible et imposant dans son interprétation.
Réussis en tout point, Captain America : Civil War prouve encore une fois qu’on peut renouveler le genre tout en le perfectionnant. Si on lui cherche quelques défauts, on peut lui reprocher un certain manque de références et de caméos. On aurait espérer voir (Charlie Cox aussi semble-t-il) Daredevil de la série Netflix ou d’autres héros, entre autres participer au combat ou même apparaître dans cette prison de superhéros qui aurait pu être beaucoup plus garni vu sa grandeur. On a aussi changé, sans dénaturer heureusement, l’histoire originale de la série Civil War de Mark Millar, en omettant quelques passages qu’on aurait souhaité voir. (L’aspect plus identitaire du registre, Iron Spider, quelques héros manquants, Spider-Man qui se dévoile au public ou tout simplement quelques morts qui auraient pu pimenter le film). Quelques moments sont complètement changés, mais c’est toujours fait avec beaucoup de doigté et de respect tout en étant toujours au service de l’histoire et de ses personnages qui ne seront clairement plus les mêmes dans les prochains volets du MCU. Deux films ou même trois films de Marvel par année semblent beaucoup trop, mais s’ils sont aussi bons que Civil War, ce n’est vraiment pas assez.
Sortie en salle : 6 mai 2016
Crédit photos : marvel.com
Excellent en tout point, Civil War est sans aucun doute le meilleur film de Marvel à ce jour!