Des allures propagandistes, un sanguinaire boucher comme héros, des propos hostiles, un réalisateur pour qui la retraite serait souhaitable, des nominations pressenties et maintenant de risibles bébés de plastique… Non, American Sniper n’aura pas manqué de marquer les esprits et d’enflammer les passions de la communauté cinéphilique de ce monde. Cependant, n’est-il pas mieux de critiquer un long métrage en se fiant uniquement aux qualités cinématographiques de ladite œuvre que de laisser nos propres convictions prendre le dessus?
Inspiré de l’autobiographie de Chris Kyle, tragiquement décédé en février 2013, American Sniper relate l’histoire de cet homme, le tireur d’élite le plus mortel de l’histoire des États-Unis. De sa jeunesse, en passant par sa formation pour rejoindre le prestigieux commando des Navy SEALs, jusqu’aux exploits de Kyle ayant fait trembler tous ses ennemis, le dernier film de Clint Eastwood dresse un portrait bien trop simpliste et romancé du personnage titulaire, et ce, malgré son désir évident à démontrer les horreurs physiques et psychologiques de la guerre, notamment à travers les relations qu’entretient le soldat avec sa famille.
Voilà où réside le véritable problème: American Sniper n’est rien d’autre qu’un de ces énièmes blockbusters rappelant un espèce de mélange entre la série vidéoludique Call of Duty et Act of Valor (qui souffrait justement du même problème); une sorte de version mollassonne de Zero Dark Thirty ou encore The Hurt Locker qui serait probablement sorti vainqueur, s’il avait bénéficié du traitement documentaire. Parce qu’il est choquant de voir un antagoniste présenté comme étant l’équivalent du « héros » (un mot qu’on entendra souvent au cours du visionnement), mais qui ne sert finalement à rien d’autre qu’être un simple « méchant », un ennemi bénéficiant comme par hasard du même don que Kyle. Frustrant également de voir un film nous imposer des émotions (le traumatisme engendré par le meurtre d’une mère et de son enfant dont la bande-annonce – toujours aussi efficace – offrait un avant-goût), et ce, au détriment total du caractère froid et Punisher-esque de son protagoniste présenté dans le bouquin du même nom (« Je n’accomplie que mon travail. », y affirme-t-il à de nombreuses reprises).
C’est donc qu’il soit présenté comme la « vraie histoire de Chris Kyle » qui fait d’American Sniper quelque chose de décevant, l’aspect blockbuster de la chose ne passant pas inaperçu. Certes, il ne faudrait pas oublier que cela ne demeure qu’ « inspiré » de fait vécu, mais le fait est que, ce 12$, c’est en la biographie homonyme du fameux tireur d’élite qu’il faudrait l’investir…
À l’affiche au Québec depuis le 16 janvier 2015.
Crédits Photos: Warner Bros. Pictures