Deux ans après la sortie de son premier long-métrage Isla Blanca, la réalisatrice québécoise Jeanne Leblanc nous offre une nouvelle œuvre, Les Nôtres, qui était présentée en ouverture de l’édition 2020 des Rendez-vous Québec Cinéma (RVQC). La cinéaste signe ici une œuvre réussie, dans le style qu’on lui connaît, mais forte de plus de maîtrise et sensibilité que jamais.
On y retrouvera Émilie Bierre, tout juste sortie d’une très bonne année depuis le tournage d’Une Colonie, où elle aura bluffé plus d’un cinéphile par son interprétation. Dans Les Nôtres, les circonstances lui demanderont un registre et un travail complètement différent qu’à l’habitude, et l’interprétation d’Émilie nous confirmera son talent : même si elle est bien entourée aux côtés d’acteurs établis tels que Paul Doucet, Marianne Farley ou Judith Baribeau, c’est tout de même elle qui vole la vedette, crevant l’écran, épatante de sensibilité.
Les Nôtres, c’est le drame entourant la famille Jodoin, déjà tourmentée par la mort récente du père de la famille. Heureusement, leur proximité avec la famille du maire du village (Paul Doucet), homme très puissant dans la communauté, leur confère une bonne qualité de vie. Mais tout se bouleversera pour Magalie, 13 ans, lorsqu’après un malaise, elle sera envoyée à l’hôpital où on découvrira qu’elle porte un enfant. Une nouvelle portant son lot de conséquences, aussi bien au niveau physique que pour la réputation de la jeune fille, dont la vie sera complètement chamboulée par la nouvelle. D’autant plus qu’on soupçonne grandement que le garçon l’ayant mise enceinte serait le fils du maire, un peu plus vieux qu’elle. La nouvelle, déjà dramatique en soi, prendra des proportions plus grandes que nature, principalement de par l’hypocrisie d’une communauté qui, si elle semble d’abord se soutenir et venir en aide aux citoyens qui la constituent, agira plutôt en effet contraire.
La communauté du village où le drame se déroule pourrait effectivement être perçue comme un personnage en soi, et on aura parfois l’impression de quelques surenchères dramatiques pour démontrer à quel point la jeune Magalie souffrira du jugement de ses pairs. Bien qu’elle soit vue avec quelques amies dans le film, on ne sentira aucunement le soutien de celles-ci dans les moments difficiles. La jeune fille semble entourée de gens qui ne savent pas réagir à la situation, en passant de la mère ayant la crise facile au travailleur social dont le professionnalisme est parfois discutable. Le drame en devient parfois plaqué, mais rien ne semble invraisemblable, grâce à la sensibilité de la réalisation et de l’interprétation. Et le drame atteindra un autre niveau dès le second acte, alors que l’intrigue prendra une toute nouvelle dimension, que je laisserai à votre discrétion le plaisir de découvrir.
Les Nôtres est donc un deuxième film réussi pour Jeanne Leblanc, qui s’installe de plus en plus dans un style qui lui est propre, détenant une prémisse déjà forte mais qui atteint un autre niveau alors que le film se dévoile.
Sortie en salles le 13 mars 2020
Les Nôtres est un film surprenant, qui maîtrise bien le drame et ne pourra pas laisser indifférent. Quelques situations parfois un peu convenues, mais toujours justes et interprétées avec brio par les comédiens principaux.