Un bon nombre de réalisateurs renommés collaborent régulièrement avec leurs acteurs fétiches. Xavier Dolan a deux muses : Anne Dorval et Suzanne Clément. Gilles Carle vouait une admiration sans borne à Chloé Sainte-Marie et Carole Laure. Depuis plusieurs années, Martin Scorcese ne jure que par Leonardo DiCaprio. Les frères Coen recrutent fréquemment les services de George Clooney. David O. Russell a déniché la combinaison gagnante en embauchant le trio composé de Jennifer Lawrence, Bradley Cooper et Robert De Niro pour les bienfaits de l’excellent Silver Linings Playbook en 2012. Joy, leur plus récent effort, confirme l’incroyable doigté de O.Russell en ce qui concerne la direction d’acteurs, talent qui a valu à Jennifer Lawrence 3 nominations aux Oscars depuis 2013.
Récit biographie, cette comédie dramatique retrace les pans marquants de la vie professionnelle et personnelle de Joy Mangano (Jennifer Lawrence). Obligée à subvenir pratiquement seule aux besoins de ses 3 enfants, de son mari paresseux (Edgar Ramirez) et de ses parents dysfonctionnels (Robert De Niro et Virginia Madsen), Joy arrive difficilement à joindre les deux bouts et accomplir son rêve d’enfance : être une inventrice. Or, l’inspiration survient enfin lorsqu’elle doit ramasser un énième dégât : créer un balai-serpillière auto-essorant qu’elle baptise la »Miracle Mop ». Convaincue qu’elle possède un produit révolutionnaire entre les mains, elle emprunte de l’argent à la richissime nouvelle compagne de son père et conçoit un prototype. Or, le bouche à l’oreille ne se passe pas aussi bien qu’escompté. Jusqu’à ce qu’elle persuade le diffuseur d’info publicités Neil Walker (Bradley Cooper) que son invention possède toutes les caractéristiques nécessaires pour faire résonner en masse les téléphones…
Respectant la forme chronologique de toute biographie classique (les débuts difficiles, les amours déchus, l’ascension fulgurante, la chute abrupte, le retour triomphant…), le scénario de Joy signé David O.Russell et Annie Mumolo propose une tournure rafraichissante lorsqu’il s’attarde sur les relations colorées entre les membres du clan Mangano. Les liens unissant cette famille atypique se dévoilent lentement à l’intérieur d’un suspense intrigant. Bien définis, les personnages deviennent rapidement attachants et frustrants à la fois. Le réalisateur de American Hustle les met magnifiquement en scène, campant leur quotidien pimenté et effréné dans des paysages hivernaux à couper le souffle. Ce contraste séduit, mais, malheureusement, O.Russell demeure très conservateur aux niveaux des plans, ne les insufflant pas de la même folie constamment présente dans Silver Linings Playbook.
Même si le film ne réinvente pas le genre, il parvient à inspirer. Modèle exemplaire de persévérance, Joy Mangano est incarnée avec brio par une Jennifer Lawrence qui ne cesse d’épater. Crédible dans les joies, les peines et les colères, la jeune actrice oscarisée offre un monologue d’anthologie en persuadant Neil Walker de croire en son produit. D’ailleurs, la chimie entre elle et Bradley Cooper est si irrésistible qu’elle éclipse les cabotinages de Robert De Niro, Isabella Rossellini et Virginia Madsen.
Bref, Joy vaut la peine d’être visionné ne serait-ce que pour l’incroyable performance de Jennifer Lawrence et la leçon de détermination prodiguée par une rêveuse qui n’a jamais arrêté d’y croire et de vouloir aider autrui.
Ce film est disponible en DVD et Blu-Ray depuis le 3 mai 2016.
Crédits Photos : 20th Century Fox