Il ne suffit pas d’une image et d’une action pour créer un bon film. Il y a de ces œuvres qui, sans la musique, n’auraient tout simplement pas la même âme. Pour créer ce genre d’osmose entre deux sens, rien de mieux que l’alliance entre le réalisateur Giuseppe Tornatore et le compositeur Ennio Morricone (qui avaient déjà collaboré pour le grandiose Cinema Paradiso)! Rajoutez à cette équipe un scénario adapté du célèbre roman d’Alessandro Baricco, Novecento, et vous obtiendrez l’assurance d’un merveilleux voyage de deux heures, autant dans l’ambiance du film que dans les noms de famille de ceux qui sont à son origine. Voici The Legend of 1900.
Tout d’abord, qu’est-ce que 1900? Ce n’est pas la date mémorable durant laquelle s’est passé un évènement historique que vous devriez vous remémorer. Rangez vos livres d’histoire, la légende que vous vous apprêtez à vivre est tout sauf factuelle. Et pour preuve : 1900 est le nom du personnage principal. Incarné avec brio par Tim Roth, 1900 (ou, de son vrai nom, Danny Boodmann T.D. Lemon Nineteen Hundred, mais appelons-le 1900) est un orphelin trouvé un jour à bord d’un navire de croisière. Puisque personne n’a connaissance de l’identité de ses parents, 1900 passe son enfance à bord du bateau. Il ne connaît rien d’autre que l’équipage, les passagers, et le piano de la salle de réception, avec lequel il passe de longues heures à improviser les plus belles mélodies.
Et c’est là que le grand talent du compositeur Ennio Morricone entre en jeu. Car puisque le film est complètement centré sur le talent de pianiste de 1900, confier la bande sonore à Snoop Dog n’aurait pas été le meilleur réflexe. Morricone signe ici l’une de ses plus grandioses musiques originales. Personne ne pourra rester insensible aux gracieuses envolées de piano, accentuées par moments par les quelques notes de trompette et de cordes. Le tout donne une ambiance poétique au film, à l’image du scénario, qui se veut lent, merveilleux, tout comme les vagues percutant le bateau de croisière.
La petite vie tranquille de 1900 ne se résume pourtant pas à son piano. C’est lors d’un de ses voyages en mer que le protagoniste, maintenant âgé d’une trentaine d’années (toutes passées sur le bateau), fera la rencontre de Max Tooney, un trompettiste avec qui il se liera d’amitié. Mais la rencontre entre 1900 et Tooney révèle chez 1900 une curiosité jusque là jamais éveillée : l’appel de la terre. 1900 sera dès lors séparé entre son désir de la vie en mer et la découverte d’un autre monde. D’autant plus que, durant un voyage, 1900 découvre pour la première fois l’amour… avec une inconnue qui quittera éventuellement le bateau pour d’autres aventures.
The Legend of 1900 est donc le récit d’amour entre un homme et la musique, ou plutôt ce qu’elle lui apporte. La poésie de cette histoire, bien présente dans le texte original de Baricco ainsi que dans la bande sonore, est malheureusement moins présente dans la réalisation de Tornatore. En effet, certaines scènes plus loufoques, voire burlesques, entrent complètement en contradiction avec l’ambiance plus jazzy du reste du récit. Entre deux envolées de piano et de trompette, on retrouve donc l’acteur Pruitt Taylor Vince qui fait des acrobaties ratées, puisque voyez-vous, il a le mal de mer. Pas très utile, pas très drôle. Par chance, 1900 nous revient après quelques minutes avec une toute nouvelle composition, et on crie au génie devant le talent du pianiste.
Il est bien certain que mon âme de musicien était appelée par ce film. Cependant, il ne faut pas nécessairement connaître les moindres secrets du jazz pour apprécier The Legend of 1900. Tout comme 1900, qui n’a jamais eu de formation musicale officielle, tout le monde peut se laisser emporter par la magie des mélodies de Morricone. Bien sur, il ne s’agit pas d’un film d’action, et la musique tient une place importante dans le film. Pour bien apprécier l’œuvre, il faut savoir se laisser emporter parmi les notes, s’échapper de la réalité, voyager avec 1900. Et ça, tout le monde peut le faire.
Comme le dit si bien l’un des personnages du film, «Quand vous entendez une musique et vous ne savez pas ce que c’est, c’est du jazz». Voilà. À mi-chemin entre le film d’amour, le drame, la comédie, le film contemplatif et le film poétique, on peut affirmer sans hésiter que The Legend of 1900, c’est du jazz.
Du jazz certes gâché par quelques fausses notes : quelques scènes burlesques mal placées, la performance plutôt douteuse de Pruitt Taylor Vince. Mais malgré tout, du très, très bon jazz.
http://www.youtube.com/watch?v=LA8v9MamhJE
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