«Je ne sais pas à quel point un film se doit dʼêtre divertissant. Jʼaime les films qui laissent des cicatrices.» Cʼest le mot dʼordre utilisé par David Fincher (Fight Club, Seven), un réalisateur qui priorise lʼimage et son impact. La série Millénium était donc toute désignée pour celui-ci. Mais, était-il nécessaire et utile aux États-Unis dʼencore sʼapproprier un succès étranger, et ce, après si peu de temps. David Fincher nous donne donc la réponse avec Les hommes qui nʼaimaient pas les femmes et il ne fait pas dans la dentelle en nous livrant un film mystérieux, froid et violent.
Millénium nous raconte lʼhistoire de Michael Blomkvist (Daniel Craig), un journaliste lavé lors dʼun procès, qui est invité à enquêter sur la disparition vieille de 40 ans de la nièce dʼun riche industriel (Christopher Plummer). En venant enquêter sur lʼîle familiale, où chaque membre à sa maison, il se retrouve alors avec une famille étrange dont chacun semble être le suspect dʼun crime odieux. Suspects, témoignages, preuves, journaux, Michael a tout a sa disposition pour résoudre lʼenquête, ou presque. Il décide alors dʼengager une experte en programmation informatique, Lisbeth Salender (Rooney Mara). Une marginale extrémiste qui nʼa pas peur des mots et des gestes. Les deux personnages sʼallient alors pour découvrir le secret de cette famille au passé douteux. Meurtre, enlèvement ou fugue, tout est possible.
Plus les indices sont dévoilés, plus la tension monte et sʼen suit un crescendo intense. Le coupable se sent envahi et décide alors dʼutiliser lʼintimidation et la violence. On a alors droit a de belles scènes mélangeant suspense et action où viennent sʼajouter de nouveaux indices pour mener vers la finale. Et cʼest à ce moment quʼon perd lʼintérêt. Quoiquʼimprévisible, la fin nʼest pas assez explosive et rend absurde lʼintrigue qui nous avait captivés depuis le début. Malgré une histoire dʼamour absurde que lʼon ne croit pas du tout, tout était bien ficelé pour mener à une fin épique. Malheureusement, le même problème était aussi dans le film original ainsi que dans le roman.
Qui dit remake dit comparaison. Le film jouit ici dʼune meilleure fluidité. Le réalisateur et le scénariste, ayant décidé de laisser de côté quelques histoires secondaires, nous livrent cependant un film avec beaucoup de longueurs. La scène culte du tatouage y est toujours, et ce, avec la même efficacité. Pour cela, il fallait trouver une actrice aussi excellente que Noomi Rapace pour camper le rôle de Lisbeth Salender. Rooney Mara, méconnaissable, mérite amplement toutes ses nominations comme meilleure actrice. Très effacée la plupart du temps, elle explose lorsque les scènes plus violentes ont lieu. Daniel Craig dans le rôle de Michael Blomkvist, joue de manière nuancée ce personnage troublé, mais sa célébrité et son image « sexy » fait en sorte quʼil rend son personnage moins personnel et moins crédible que dans lʼoriginal. Les acteurs personnifiant la famille sur lʼîle sont, quant à eux, tous excellents.
Une histoire aussi compliquée se doit dʼêtre claire et bien réalisée. Et cʼest le cas. David Fincher réalise de main de maître ce film avec plusieurs plans courts, mais intenses. Le montage saccadé ajoute à la tension et les lieux choisis tels que la Suède rurale en hiver ajoutent froideur et mystère aux plans. Chaque maison de lʼîle a son atmosphère unique et si particulière. La dernière maison, distinguée et avec de nombreux couloirs, sert de terrain de jeu à une scène finale particulièrement intense et stressante.
La musique, sans rien imposer, suggère et fait monter le suspense. Tout le mérite est attribué à Trent Reznor, avec qui David Fincher avait travaillé pour Le réseau social (2010). Film avec lequel il avait gagné lʼoscar pour la meilleure musique. Une trame sonore teintée de techno et dʼélectronique mélangés avec des violons et des bruits ambiants rappelant la scie mécanique. Stressante et nuancée, cette musique ajoute à la fois beauté et tristesse à chaque scène. On peut même entendre une reprise métal industrielle d’Immigrant Song de Led Zeppelin dans lʼincroyable générique dʼouverture où est modélisées des parties de lʼhistoire dans lʼencre noire.
La suite nʼest pas encore en chantier, mais les deux acteurs principaux ont signé pour reprendre leur rôle respectif dans La fille qui rêvait dʼun bidon dʼessence et dʼune allumette et La reine dans le palais des courants dʼair. Cependant, David Fincher nʼa pas encore signé pour la réalisation. Pour lʼinstant il signe le premier volet de façon unique avec une réalisation magistrale pour un film qui aurait mérité une fin grandiose.
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